« Vous voyez ce que ça fait d’essayer l’extrême-droite », alertent les lesbiennes lyonnaises

A peine arrivées sur place, mercredi soir, les membres de la collective Lesbiennes contre le patriarcat ont vu les volets du consulat d’Italie se fermer devant elles. Les représentants du gouvernement italien de Lyon n’avaient pas l’intention d’écouter les revendications du rassemblement, répondant à l’appel d’EuroCentralAsian Lesbian* Community (EL*C). Pourtant, les voix de près de 200 personnes se sont fait entendre devant l’institut, bravant la pluie, scandant « Siamo tutti antifascisti ! », « Solidarité avec les femmes du monde entier » ou encore « Y’en a assez de cette société qui ne respecte pas les trans, les gouines et les pédés ».

« Nous sommes là pour manifester notre soutien aux mères lesbiennes italiennes, expliquent des bénévoles* de la collective organisatrice de la manifestation lyonnaise. C’est terrifiant ce qui est en train de se passer et ça prouve que nous sommes jamais en sécurité. Il y a toujours un danger de perdre les droits qu’on a acquis. »

De la compassion et de la crainte

Depuis une circulaire envoyée en janvier par la Première ministre Giorgia Meloni, arrivée au pouvoir fin septembre 2022, des municipalités comme Milan, Bergame et plus récemment, Padoue, demandent à effacer de l’acte de naissances d’enfants nés par PMA, le nom de la mère non biologique.

Dans la foule lyonnaise, Emma, 24 ans, est très touchée. « C’est hypergrave ce qui est en train de se passer, dit-elle. J’ai à la fois beaucoup de compassion pour ces femmes et à la fois, beaucoup de crainte pour moi-même. »

« Les gens prennent cette mesure à la légère »

En plus de penser aux Italiennes, les lesbiennes lyonnaises « pensent à elles ». « Ça me donne envie de pleurer », lance Constance, 33 ans. Avant d’ajouter : « Essayez l’extrême droite, vous voyez bien ce que ça fait. Elle prive concrètement les gens de leurs droits. C’est ce qu’il se passe avec cette circulaire mais le gouvernement s’attaque aussi aux enfants nés de GPA. On voit les résultats d’avoir un tel parti au pouvoir. » La Russie et la Hongrie sont aussi citées, mais l’Italie, c’est « à côté ». « On se dit qu’on est voisine et que ça peut aussi arriver très vite en France. Ça fait très peur », affirment Axance et Jessica, 33 ans et 30 ans.

Venue avec sa femme et son enfant d’un an et demi, Constance insiste sur la gravité de cette situation « extrêmement terrifiante ». « On l’a vu aux dernières élections, on le voit aussi avec les prises de position actuelles où les idées de l’extrême droite sont constamment banalisées. Nous ne sommes pas si loin, dans tous les sens du terme, d’arriver aux mêmes constats. Et les gens prennent tout ça à la légère… », appuie-t-elle.

Des conséquences directes au quotidien pour les mères lesbiennes

Car les conséquences sont directes dans le quotidien de ces mères. Comme le rappelle la collective Lesbiennes contre le patriarcat, cette mesure empêche la mère non biologique d’aller récupérer son enfant à l’école, de l’accompagner en cas d’hospitalisation et ne lui donne aucun droit si la femme qui a porté le bébé meurt. L’enfant deviendra orphelin. La collective et le planning familial du Rhône soulignent alors à quel point « cette loi va à l’encontre des droits fondamentaux et de l’intérêt des enfants », contrairement à ce qu’avance le gouvernement de Meloni.

Devant le consulat italien, les personnes interrogées aimeraient « une prise de position claire » de la France face à cette mesure. Une façon de se rassurer. « Mais on n’y croit pas trop », avouent deux manifestantes. « En juin, Emmanuel Macron a affiché sa volonté de collaborer avec ce gouvernement fasciste, notamment sur les questions d’immigration, en recevant Giorgia Meloni », rappelle la collective. « En 2028, nous pourrions subir un énorme retour en arrière », alerte-t-elle évoquant des droits « toujours insuffisants et fragiles » des lesbiennes en France.

« Avec mon épouse, on a déjà décidé de partir du pays si l’extrême droite passe. On ira au Canada ou en Suisse, mais on ne peut pas risquer de tout perdre du jour au lendemain comme c’est le cas en Italie », confie Constance.


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