des milliers de manifestants favorables au putsch rassemblés devant l’ambassade de France à Niamey

Des milliers de personnes ont manifesté, dimanche 30 juillet, devant l’ambassade de France au Niger, à Niamey, certains d’entre eux insistant pour y entrer, a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse, lors d’un rassemblement de soutien aux militaires putschistes ayant renversé le président élu, Mohamed Bazoum, au Niger.

D’autres ont arraché la plaque affichant « Ambassade de France au Niger », avant de la piétiner et de la remplacer par des drapeaux russe et nigérien. « Vive Poutine »« vive la Russie »« à bas la France », crient des manifestants.

Ce rassemblement survient alors que la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) tient un sommet extraordinaire, dimanche, pour faire le point sur la situation au Niger. Le président nigérian, à la tête du bloc ouest-africain, Bola Tinubu, avait condamné le putsch dès mercredi, et promis que l’organisation et la communauté internationale « feraient tout pour défendre la démocratie » et son « enracinement » dans la sous-région.

La Cedeao, et ses quinze membres, peut prononcer des sanctions contre le Niger, l’un de ses membres, et emboîter le pas à l’Union européenne (UE) et à la France, qui ont décidé de suspendre leurs aides budgétaires, et même sécuritaires du côté de l’institution européenne, ne reconnaissant pas les « autorités » issues du coup d’Etat.

Une « intervention imminente », selon la junte

La junte au Niger, qui a renversé M. Bazoum, a dénoncé une menace d’« intervention militaire imminente à Niamey » avant même la tenue du sommet ouest-africain.

« L’objectif de cette rencontre est la validation d’un plan d’agression contre le Niger, à travers une intervention militaire imminente à Niamey en collaboration avec les pays africains non membres de l’organisation et certains pays occidentaux », selon un communiqué lu par un membre de la junte, Amadou Abdramane, à la télévision nationale. « Nous rappellerons une fois de plus à la Cedeao ou tout autre aventurier notre ferme détermination à défendre notre patrie », a-t-il ajouté.

Les putschistes avaient déjà mis en garde sur « les conséquences qui découleront de toute intervention militaire étrangère », évoquant « l’attitude belliqueuse » d’« anciens dignitaires terrés dans des chancelleries en collaboration avec ces dernières ».

Dans le sillage de la France et de l’UE

Depuis la prise du pouvoir à Niamey, la pression s’accroît chaque jour davantage sur le nouvel homme fort proclamé du pays, le général putschiste Abdourahamane Tiani, chef de la garde présidentielle du Niger, à l’origine de la chute de M. Bazoum, séquestré depuis quatre jours.

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Le putsch a été vivement condamné par les partenaires occidentaux du Niger, plusieurs pays africains et l’ONU, qui ont demandé la libération du président élu. L’entourage de ce dernier a dénoncé « un coup d’Etat pour convenance personnelle », affirmant que M. Bazoum « va très bien » malgré sa séquestration. A Nairobi, le président kényan, William Ruto, a estimé qu’avec ce coup d’Etat « l’Afrique a subi un sérieux revers dans ses avancées démocratiques ». Le ministre de l’énergie du président déchu, Ibrahim Yacouba, a, quant à lui, invité la Cedeao et l’Union africaine (UA) à lutter pour « la libération sans délai » de M. Bazoum et la reprise de ses fonctions.

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De son côté, la France a annoncé, samedi, la suspension de son aide publique pour le Niger, qui s’est élevée à 120 millions d’euros en 2022. Quant à l’UA, celle-ci a posé vendredi un ultimatum de quinze jours aux militaires pour rétablir « l’autorité constitutionnelle ».

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a, pour sa part, assuré à M. Bazoum de « l’indéfectible soutien » de Washington, assurant que le coup d’Etat mettait en péril le « partenariat » entre les Etats-Unis et le Niger. Il a également parlé dimanche avec M. Tinubu, exprimant sa « profonde inquiétude » tout en saluant le « leadership » et les « efforts » du président nigérian pour « restaurer l’ordre constitutionnel au Niger », a rapporté Matthew Miller, porte-parole du département d’Etat.

Pivot contre le djihadisme

Situé en plein cœur du Sahel, le Niger est l’un des pays les plus pauvres au monde, vaste territoire désertique d’une population de quelque 20 millions d’habitants, avec une croissance démographique parmi les plus élevées de la planète. Riche en uranium, le Niger connaît une histoire jalonnée de coups d’Etat depuis l’indépendance de cette ex-colonie française, en 1960. La région, elle aussi, est instable, le pays étant le troisième à connaître un coup d’Etat depuis 2020 après l’arrivée des militaires au Mali et au Burkina Faso.

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Niamey est aussi le dernier allié avec lequel Paris entretient un partenariat dit « de combat » contre les djihadistes, dans cette région minée par l’instabilité, la précarité et les attaques. Paris compte actuellement quelque 1 500 militaires au Niger, qui opéraient jusqu’à présent conjointement avec l’armée locale.

Le mouvement civil M62, qui avait déjà protesté contre l’opération « Barkhane » de l’armée française au Sahel et au Sahara, a appelé à manifester dimanche malgré l’interdiction du rassemblement. Le général Tiani, proclamé chef de l’Etat par ses pairs, a justifié le coup d’Etat de mercredi par « la dégradation de la situation sécuritaire ». Tout en qualifiant d’« appréciable » le soutien des « partenaires extérieurs » du Niger – la France et les Etats-Unis (1100 soldats) faisant partie des principaux – il leur a demandé de « faire confiance [à ses] Forces de défense et de sécurité ».

Le Monde avec AFP


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