Colère des agriculteurs : « A Paris, ils vont avoir peur », le blocage de l’autoroute A16 a démarré dans l’Oise

« On est là, on y reste », prévient Régis Desrumaux, président de la FDSEA de l’Oise, qui mène le blocage de l’A16 depuis Beauvais. « On va continuer comme ça et à Paris, ils vont avoir peur. Il faut qu’on secoue le cocotier pour que des mesures concrètes tombent. »

Le lobbyiste Thierry Coste, proche du patron des chasseurs Willy Schraen, a indiqué mardi qu’il ne soutenait plus sa liste « Alliance rurale » aux élections européennes.

Resté « discret » depuis sept semaines, Thierry Coste a repris la parole en raison de la fronde des agriculteurs, qui « coche toutes les cases » de cette liste pro-ruralité dont il « n’arrive pas à comprendre le silence » sur ce sujet.

« On a des sacs de couchage, du café, il y a un barbecue, avec un groupe électrogène. On est prêt pour tenir deux jours, trois jours même s’il faut », prévient une agricultrice. Une trentaine de tracteurs et une centaine d’exploitants sont en train de s’installer pour occuper la barrière de péage de Beauvais Nord, sur l’A16. Une opération, un blocage total à l’exception de la bande d’arrêt d’urgence, qui pourrait durer toute la journée, voire plus, selon plusieurs manifestants. « C’est une accumulation, là c’est un mouvement national. On ne lâchera rien », explique Alexandre Dugrosprez, agriculteur. 

« Nous allons redéposer une proposition de loi […] pour des prix qui puissent couvrir a minima leurs coûts de production », a déclaré mardi à la presse la députée Insoumise de Seine-Saint-Denis Aurélie Trouvé. « Nous comprenons les agriculteurs et nous sommes aux côtés de tous ceux qui demandent tout simplement de pouvoir vivre dignement de leur travail », a également ajouté la députée.

Son état est toujours jugé préoccupant après l’accident qui a couté la vie à sa mère, une agricultrice d’une trentaine d’années, ce matin aux environs de Pamiers (Ariège). 

Le président du groupe communiste André Chassaigne a demandé la tenue d’une minute de silence à l’Assemblée nationale, après le drame survenu ce matin dans l’Ariège. Mais l’Insoumis Éric Coquerel s’y est alors opposé, exigeant, si cette minute de silence se tenait, qu’une autre soit respectée en hommage aux deux adolescents de 14 et 18 ans, tués la semaine dernière à Saint-Denis. En l’absence de consensus, il a été donc décidé de ne pas respecter cette minute de silence, selon nos informations. 

Des agriculteurs du Lot-et-Garonne ont été reçus par le préfet ce matin, dont le syndicat Coordination rurale, pour lui faire part de leurs demandes. « Si dans les six-huit heures (prochaines), on n’a pas de retour, demain ce sera la folie », prévient la représentante du syndicat interrogée par Sud-Ouest.

Depuis hier soir, la circulation des trains est très compliquée sur la ligne entre Bordeaux et Toulouse. Des agriculteurs ont déversé du fumier et des pneus sur les voies dans le secteur de la gare d’Agen (Lot-et-Garonne). 

Le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau se rendra en Ariège dans la journée. « Aujourd’hui, tous nos agriculteurs sont en deuil. Notre Nation est bouleversée et solidaire. Au nom du gouvernement, je veux dire ma peine et adresser mon plein soutien à la famille et aux proches des victimes », a réagi le Premier ministre Gabriel Attal sur X (ex-Twitter).

Plusieurs déviations ont été mises en place par les autorités dans le Tarn-et-Garonne : 

• Sur l’A62, sortie obligatoire à Castelsarrasin (n°9) dans le sens Toulouse-Bordeaux. La circulation des véhicules de plus de 7 tonnes est interdite sur le pont Napoléon à Moissac.
• Sur l’A20, sortie obligatoire à Caussade (n°59) dans le sens nord-sud et à ZI nord dans le sens Sud-Nord.

Pour Simon Letellier, éleveur laitier et céréalier dans l’Oise, le « Green Deal », dénoncé par des exploitants agricoles au sein de l’Europe, a servi de détonateur. « Trop c’est trop. Là, il y a un ras le bol général. » Il cite pêle-mêle la hausse des charges, les contraintes administratives et des prix à la vente qui leur échappe complètement. « Il y a plein de problèmes au quotidien. »

Le blocage de l’A16 se lance doucement. « Soyez vigilant, il y a des fous sur la route, faites attention », rappelle Luc Smessaert, vice président de la FNSEA, en évoquant le décès survenu en Ariège. « On a une pensée pour cette famille. On va commencer par une minute de silence. Ce n’est pas normal qu’une personne perde la vie pour défendre son métier. On en a marre », complète Régis Desrumaux.

Alexandra, agricultrice âgée d’une trentaine d’années, est décédée sur place des suites de ses blessures. Son mari, âgé d’une quarantaine d’années, est grièvement blessé. Leur fille, âgée de 14 ans, se trouve dans un état « préoccupant », selon la préfecture. Elle a été héliportée vers le centre hospitalier de Toulouse.

D’après les premiers éléments communiquées par la préfecture de l’Ariège, le véhicule, à bord duquel se trouvaient trois personnes, a percuté en pleine nuit et sans éclairage « un mur de bottes de paille » recouvert d’une bâche noire. Des manifestants se trouvaient abrités sous un barnum, derrière ce mur de paille. « Le véhicule a alors percuté trois personnes, avant de finir sa course contre la remorque d’un tracteur », indique la préfecture. A ce stade de l’enquête, le caractère intentionnel de la collision n’a pas été établi.

Une enquête ouverte pour « homicide involontaire aggravé » et « blessures aggravées » a été ouverte après la mort de l’agriculture en Ariège, avait indiqué le procureur de la République de Foix, dans un communiqué. L’accès interdit à la N20 était « sécurisé » et « visible », annonce le préfet de l’Ariège lors d’une conférence de presse. L’automobiliste « a forcément franchi le barrage sciemment » pour accéder la N20. 

Les trois occupants de la voiture sont de nationalité arménienne. Les raisons de leur présence sur cette voie et à cette heure matinale doivent encore être précisées.

Les agriculteurs de l’Oise rejoignent le mouvement. Selon nos informations, ils arrivent au compte-gouttes à Beauvais à proximité de l’autoroute A16. Les plaques d’immatriculation sont couvertes de chatterton. 

« Ça va mobiliser, avait prédit Luc Smessaert, agriculteur dans l’Oise et vice-président de la FNSEA. C’est une période plus calme pour certaines exploitations donc les collègues vont avoir envie de se joindre au mouvement. » Le responsable syndical n’exclut pas une « montée en puissance » dans les jours à venir. 

Le préfet du Lot-et-Garonne devrait recevoir les agriculteurs en colère à 11 heures à Agen, selon notre confrère de Sud-Ouest. Des tonnes de pneus, de lisier et de déchets ont été déversées en moins d’une heure devant les grilles. 

L’accident mortel à Pamiers est « terrible » mais « cela ne doit pas remettre en cause une forme de mobilisation qui est plutôt traditionnelle », a soutenu José Bové, ancien député européen et l’un des fondateurs de la Confédération paysanne. 

Le député communiste du Puy-de-Dôme André Chassaigne propose que l’Assemblée nationale « exprime sa solidarité (envers l’agricultrice tuée ce matin) par une minute de silence cet après-midi ».

« Je pense à elle, je pense à son conjoint et à sa fille qui luttent encore pour leur vie. C’est un drame pour nous tous », écrit le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau sur son compte X (ex-Twitter). 

Carole Delga, présidente de la région Occitanie, a réagi au décès de l’agricultrice dans l’Ariège. « Ce drame choquant ajoute à la détresse des agriculteurs. Mes pensées et mes condoléances aux proches, aux familles et aux agriculteurs ariégeois. Il appartient à la justice de faire son travail », écrit-elle.

L’autoroute A63 est toujours bloquée à Bayonne (Pyrénées-Atlantiques). Plusieurs déviations sont mises en place pour les véhicules légers et les poids lourds. 

« La déviation est fortement conseillée par l’A65 pour circuler sur l’axe Bordeaux – l’Espagne (Nord-Sud et Sud-Nord) », indique la préfecture sur son compte X (ex-Twitter).

Plusieurs tracteurs déversent des tonnes de déchets (fruits, tripes et lisier) devant la préfecture d’Agen ce matin. Les agriculteurs espèrent rencontrer le préfet pour faire entendre leurs revendications, dont la baisse de la taxe sur le gazole routier. 

Une minute de silence a également été observée sur place en mémoire de l’agricultrice décédée tôt ce matin dans l’Ariège, indique notre consoeur de Sud-Ouest. 

Les Jeunes Agriculteurs et la FDSEA de l’Oise appellent à manifester sur l’autoroute A16 en direction de Beauvais à partir de 11 heures. « Aujourd’hui, le gouvernement nous impose toujours plus de restrictions qui mettent nos exploitations en péril », défendent-ils dans une publication sur Facebook. 

Le blocage de la RN20 dans l’Ariège, lieu du drame, est levé après l’accident. « Les Jeunes Agriculteurs et la FDSEA de l’Ariège témoignent tout leur soutien aux proches et à la famille des victimes », écrivent les syndicats dans un communiqué relayé par nos confrères de BFM et France Bleu.