Claire Nouvian, Sylvia, Cécile… Le détail très cru des accusations de viols



HULOT. Pendant quatre ans d’enquête, les journalistes d’Envoyé spécial ont investigué sur les accusations d’agressions sexuelles de Nicolas Hulot. Si tous les témoignages sont désormais prescrits, les récits frappants de ces cinq femmes risquent de faire beaucoup de bruits au plus haut sommet de l’Etat.

[Mis à jour jeudi 25 novembre 2021 à 23h22] “Je n’ai pas envie de me défendre. Ca sera parole contre parole”. Voici la défense de Nicolas Hulot, en réponse à l’appel d’Elise Lucet, lors de l’émission Envoyé spécial, diffusé ce jeudi, sur France 2. Toutes affirment avoir été victimes de gestes déplacés, voire pire, de la part de Nicolas Hulot. France 2 leur donnait la parole. 

Sylvia : “Qui allait me croire”

La première, Sylvia, affirme avoir été agressée sexuellement par l’ancien ministre en 1989. Au moment des faits, elle a 16 ans, et lui 34 ans. Il est alors présentateur de la célèbre émission “Ushuaïa”, et sa présumée victime l’admire. “Je me reconnais dans ses actions et dans les choix faits par Nicolas Hulot”, explique l’accusatrice, dans l’émission de France 2. A travers un jeu concours lancé par la Maison de la radio, elle dit avoir écrit une lettre pour lui adresser toute son admiration. En réaction, le politique lui aurait envoyé une invitation, le 27 mai 1989, Sylvia pour participer à son émission “Antipodes” sur France inter

A la fin de l’émission, selon Sylvia, le présentateur l’aurait invité à prendre un café, en tête à tête. “Je suis ultra intimidée, c’est quand même la première personne publique que je vois d’aussi près”, témoigne Sylvia. Puis, après s’être intéressé à son invitée, Nicolas Hulot aurait même décidé de la raccompagner jusqu’à une bouche de métro. Au moment où la jeune fille mineure sort de sa voiture, le trentenaire lui aurait demandé “de l’embrasser dans le cou”. “Vous en avez rêvé”, lui aurait demandé alors le politique, après exécution de sa présumée victime. Puis, il l’aurait emmené sur un parking “à ciel ouvert”, et aurait décidé de “défaire son pantalon” et de “montrer son sexe”. “Je me rappelle d’être dans un état d’incompréhension”, avant d’être “forcée à faire une fellation”, témoigne Sylvia. Et Sylvia de rappeler : “Je suis tétanisée. Je ne l’ai jamais fait. Je suis en train de me demander si c’est ça une relation amoureuse. Comme je suis fan de lui, je ne peux pas me dire que ce qu’il se passe ne peut pas arriver. […] Je suis coincée.” La scène d’agression sexuelle se serait conclu par une seule phrase du présumé coupable : “Remaquillez-vous, on dirait que vous avez fait des trucs”, avant de la raccompagner à une bouche de métro.

Aujourd’hui, dans l’émission d’Envoyé Spécial, Sylvia dit vouloir “se libérer”. “Il faut que je sorte de cette voiture”, explique l’accusatrice. Sans preuves, elle ne peut pas grand chose devant la justice. Par ailleurs, remontant à plus de 30 ans, les faits sont désormais prescrits, regrette-t-elle. “Qui allait me croire”, répète Sylvia dans le reportage.

Pascale Mitterrand : seule contre tout le monde politique

Le second témoignage était déjà connu du grand public. Il s’agit de celui de Pascale Mitterrand, qui a rencontré le politique lors d’un stage de photographie chez Sipa Press. Dans le reportage de France 2, on comprend que la rencontre la petite-fille du président et l’ancien ministre avait bel et bien été forcée. En 1998, Nicolas Hulot demande au patron de Sipa Press d’envoyer en Corse sa jeune stagiaire, à une seule condition “qu’elle vienne seule”. Les faits auraient eu lieu lors du dernier soir dans cette villa corse. 

Mais en 2018, au moment de la plainte de Pascale Mitterrand, Nicolas Hulot avait d’abord voulu écarter tout soupçon sur l’âge de la plaignante : au moment des faits présumés, elle n’était pas mineure selon lui, alors qu’elle était d’abord présentée comme une jeune femme de 17 ans. Puis Nicolas Hulot avait indiqué avoir été entendu, à sa demande, par les gendarmes en charge de l’affaire en 2008 et que celle-ci avait été classée sans suite. “Elle a été classée sans suite parce que non seulement l’affaire avait été prescrite”, a-t-il indiqué, mais parce que “les enquêteurs ont considéré que rien ne permettait de poursuivre”. “C’est vrai qu’il y a eu cette plainte mais la justice est passée, il faut en tenir compte”, concluait-il.

A l’époque, l’affaire agite au sommet de l’Etat. Après la plainte et les révélations dans le magazine Ebdo, les politiques se succèdent sur les plateaux de télévision pour défendre le ministre. A l’époque, Marlène Schiappa publie même un plaidoyer décrivant le politique comme “charmant”, “respectueux” et qui “porte un combat majeur pour l’avenir de la planète”. Six mois plus tard, l’ancien ministre de la Transition écologique démissionne.

Cécile : agressée dans un taxi à Moscou

Cette affaire très médiatique a ouvert la voix à de nouveaux témoignages, enfouis pendant plusieurs années. “En février 2018, quand l’article d’Ebdo est sorti, ça m’a donné une gifle”, relate le troisième témoin, Cécile. En septembre 1998, à 23 ans, Cécile est contractuelle à l’ambassade de France à Moscou. Un jour, on lui explique qu’elle doit se rendre à l’aéroport de Moscou pour aider Nicolas Hulot, qui est coincé à la douane. Ca serait même une demande du président de la République de l’époque, Jacques Chirac. Pour la remercier d’avoir débloqué la situation, Nicolas l’aurait invité avec toute son équipe à dîner à son hôtel. A la suite du dîner, toute l’équipe se serait rendu dans un bar dansant de Moscou, où le politique aurait décidé de lui offrir un premier verre. “Qu’est ce qu’on peut dire à quelqu’un de si célèbre ?”, questionne Cécile.

Après des premières remarques désobligeants, Cécile aurait décidé de rentrer chez elle et aurait été suivie dans le taxi par Nicolas Hulot. “Dans le taxi, il me tarde qu’une chose, c’est que ça se finisse”, raconte celle qui a 23 ans au moment des faits. En lui posant la main sur la cuisse, Nicolas Hulot lui aurait proposé : “Si tu veux je peux t’avoir un boulot chez TF1”, explique Cécile. “Il se jette sur moi, il essaye de m’embrasser, il me touche les seins, l’entre-jambes”, raconte la témoin. Avant d’ajouter : “Je l’ai poussé et l’ai frappé au visage. Je crois que le non était très clair”.

Claire Nouvian : alertée des actions du politique

“Il y a clairement un disfonctionnement dans ses rapport avec les femmes”. Ces mots, ce sont ceux de Claire Nouvian, qui avait rencontré Nicolas Hulot, lors d’un tournage de son émission Ushuaïa, en 2008. “Avant de partir en tournage, son entourage me prévient. Il faut éviter les situations où tu es seule avec lui. Si vous travaillez, c’est dans le restaurant de l’hôtel et pas dans ta chambre. Si il vient dans ta chambre le soir, n’ouvre pas”, raconte celle qui a rencontré le journaliste lors d’un tournage au Costa Rica. La témoin souligne même que trois à quatre alertes lui seraient revenues. Aucun acte lors du tournage, mais plusieurs années plus tard, le politique aurait tenté de l’embrasser. D’après la témoin, “il y a beaucoup de jeunes filles qui passent à la casserole”. Mais d’après cette dernière, toutes ne seraient pas consentantes.

Des scènes sur le lieu de travail

Les accusations ne seraient donc pas ignorées des politiques. D’après le quatrième témoignage, Nicolas Hulot aurait déjà faire subir de telles accusations sur son lieu de travail. Lors d’une première réunion de travail, cette femme qui avait collaboré avec Nicolas Hulot se serait penché vers lui “pour l’embrasser à pleine bouche au moment de lui dire au revoir”. “Il n’y a aucun sous-entendu. C’est forcément de force, car c’est par surprise”, explique son ancienne collaboratrice. La nouvelle témoin se serait enfuie du bureau, dès cette agression. Mère célibataire avec des enfants en bas âge au moment des faits, la témoin explique qu’elle se serait battue s’il elle n’avait pas peur de tout perdre. “C’est inadmissible. Je lui ai dit sur le coup”, explique la témoin, restée anonyme. Le politique lui aurait même envoyé un message à la suite : “Je n’appelle pas pour m’excuser, mais pour regretter ne pas en avoir eu plus”. 

Nicolas Hulot dément et se défend

Dans une interview accordée au Point jeudi, Me Alain Jakubowicz dénonce avec véhémence la proposition d’Elise Lucet, présentatrice de l’émission, pour faire réagir son client à l’enquête, ce que Nicolas Hulot a refusé : “Nous avons demandé à Élise Lucet et aux auteurs du reportage – que personne n’a vu – de nous en fournir une copie afin que nous puissions le visionner et préparer nos réponses. Mme Lucet s’y est refusée, se contentant de nous donner à voir quelques bribes de l’émission, sélectionnées par elle. Élise Lucet nous dit ” venez, regardez et défendez-vous “, comme si nous étions convoqués par la PJ ou devant un procureur”.

Pour l’avocat, “dans le procès judiciaire, qui est le seul qui vaille, le mis en cause est informé des faits qui lui sont reprochés avant de devoir s’en expliquer ; il connaît l’identité des plaignantes qui le mettent en cause avant d’être confronté à elles ; il bénéficie d’un avocat et dispose du dossier. On aimerait au moins savoir qui sont les personnes qui accusent Nicolas Hulot, et de quoi, c’est le minimum. Eh bien, non, Mme Lucet s’y refuse ! Elle invoque le ‘secret des sources’, mais ça n’a rien à voir ! On ne parle pas ici de ‘sources’, mais d’accusations, et elles sont extrêmement graves”, se désole-t-il. Fustigeant une “Star Ac en beaucoup plus glauque”, Me Alain Jakubowicz rappelle qu’il n’y a “aucune enquête en cours sur ces faits”.

De son côté, Nicolas Hulot avait pris la parole dès mercredi sur BFM TV, assurant que “ni de près, ni de loin, je n’ai jamais commis ces actes. Ces affirmations sont purement mensongères. Tout cela n’a jamais existé”. L’émission “Envoyé spécial” est prévue à 21h10 ce jeudi soir sur France 2.

Nicolas Hulot sur BFM TV

Lors de son passage du BFMTV, mercredi 24 novembre, Nicolas Hulot s’est défendu de toute agression sexuelle. “Ni de près ni de loin je n’ai commis ces actes, ces affirmations sont mensongères”, a affirmé l’ancien animateur et homme politique. “Je n’ai jamais contraint qui que ce soit”, a-t-il martelé, dénonçant un “système qui est en train de perdre la raison”, avec “la justice qui se déplace sur les plateaux de télévision”. “Je vais quitter la présidence d’honneur de ma fondation, pour les protéger des salissures (…) Je quitte définitivement la vie publique parce que je suis écœuré”, a-t-il déclaré. “Pourquoi pérenniser une notoriété qui me fait subir ce qu’un homme peut subir de pire?”.

Nicolas Hulot a aussi décidé d’employer des arguments choc pour sa défense : “Je sais que j’ai un physique très ingrat et que donc seule la contrainte me permet de vivre des histoires d’amour… Mais plus sérieusement, je n’ai jamais séduit par contrainte”. Des propos qui ont provoqué une réaction de la ministre déléguée chargée de l’Egalité femmes-hommes Elisabeth Moreno. “Ironiser sur un tel sujet ? Sérieusement ?”, s’est-elle indignée sur Twitter.

Des rumeurs et deux accusatrices dévoilées dès 2018

Ce n’est pas la première fois que Nicolas Hulot est au cœur d’une affaire du genre. En février 2018, alors qu’il était membre du gouvernement d’Emmanuel Macron, l’animateur TV, connu pour son engagement en faveur de l’écologie, avait fait l’objet d’un article dans le magazine l’Ebdo, disparu depuis, qui faisait état d’une plainte pour viol déposée en 2018 à son encontre. Une seconde affaire plus ancienne avait également été révélée à cette occasion.

La première affaire concernait des accusations de harcèlement présumé subi par une ancienne collaboratrice de la Fondation Hulot. Au micro de BFMTV déjàle 8 février 2018, Nicolas Hulot avait nié purement et simplement avoir fait l’objet d’une quelconque plainte. “La réponse est non, et je le dis avec d’autant plus de force que la personne en question, qui est parfaitement identifiée, avec laquelle je suis en contact, vous dira la même chose”, avait-il martelé face à Jean-Jacques Bourdin.

Et quand son intervieweur avait évoqué un “accord de confidentialité”, voire une “transaction financière”, pour acheter le silence de la plaignante, Nicolas Hulot s’était insurgé, demandant à ce qu’on lui amène le “chèque” comme preuve. L’ancienne collaboratrice de Nicolas Hulot aurait par la suite été salariée à l’Assemblée nationale, ce qui alimente les théories d’un échange de bons procédés pour étouffer l’affaire.

Biographie de Nicolas Hulot

Fervent défenseur de l’écologie, Nicolas Hulot est né le 30 avril 1955 à Lille. Dès son enfance, il aime déjà beaucoup les voyages et la photographie. Après quelques petits boulots, Nicolas Hulot réalise ses premiers photoreportages à l’agence SIPA, un premier travail qui lui permet de faire le tour du monde. De par son métier, le photographe s’intéresse tout naturellement à l’univers des médias. L’écologiste démarre ainsi une carrière de journaliste sur les ondes de France Inter. Il fait ensuite ses premiers pas sur le petit écran, en 1980, dans une émission pour enfants, intitulée ” Les visiteurs du mercredi “. 

En 1987, Nicolas Hulot lance sur TF1 “Ushuaïa, le magazine de l’extrême”, une émission qui va devenir un véritable succès et le propulser au sommet. De ce programme découleront une nouvelle chaîne, ainsi qu’un mensuel en kiosque. En parallèle à son émission sur la nature devenue culte, Nicolas Hulot présente en 1996 “Opération Ovakango” sur la même chaîne. A côté de sa carrière d’animateur, le journaliste publie plusieurs livres axés sur la nature, l’écologie, à l’instar de “Graines de possibles” ou “Le syndrome du Titanic”.

La Fondation Nicolas Hulot et le “Pacte écologique”

En tant qu’ancien membre d’Europe Écologie-Les Verts, la protection de l’environnement et la sensibilisation du grand public sur les questions écologiques sont au centre de ses aspérités. En 1990, Nicolas Hulot crée la “Fondation Ushuaïa” qui devient, en janvier 1995, la “Fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l’homme” puis en 2011, la “Fondation pour la nature et l’homme”.

Nicolas Hulot songera à se présenter à l’élection présidentielle de 2007 afin que les questions relatives à la protection de l’environnement soient véritablement prises en compte. Il se retirera finalement après la signature du Pacte écologique par un grand nombre de candidats des différents partis. En avril 2011, il se déclare candidat à la présidentielle de 2012 et dans cette démarche s’inscrit à la primaire présidentielle écologiste en 2011. Il est battu par Eva Joly qui atteint 49,75 % des voix.

Un ministre du gouvernement Macron

En 2015, il devient “envoyé spécial pour la protection de la planète” ce qui inclus la préparation de la 21ème conférence sur le climat (COP21). Dans ce cadre, il lance le “Sommet des Consciences”. La conférence rassemble une quarantaine de personnalités du monde entier afin de répondre à la question “The climate, why do I care ?” soit “Le climat, pourquoi je m’en soucie ?” En janvier 2016, il quitte son poste d’envoyé spécial. 

A plusieurs reprises, Nicolas Hulot a refusé d’être ministre de l’Ecologie, pourtant proposé par Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande. Pour Emmanuel Macron, en revanche, il prendra le portefeuille de la Transition écologique et solidaire en 2017. Un poste qu’il quitte en août 2018, quelques mois après la révélation d’une première affaire d’agression sexuelle présumée, classée sans suite.

Qui est Florence Lasserre, la femme de Nicolas Hulot ?

Côté vie privée, Nicolas Hulot est marié depuis 2002 à Florence Lasserre, la mère de deux de ses trois enfants, Nelson et Titouan. C’est en janvier 1996 que l’animateur d’Ushuaïa rencontre, à Chamonix, cette férue de ski ayant vécu trente ans au pied du Mont Blanc. Il vient alors tout juste de se séparer d’Isabelle Patissier, double championne du monde d’escalade, avec laquelle son mariage capotera entre 1993 et 1996. Auparavant, il avait vécu avec Dominique Cantien, directrice des variétés à TF1 de 1986 à 1992. Une histoire qui se terminera “de manière explosive” raconte aussi sa biographie. Après avoir vécu en Corse, le couple qu’il forme toujours avec Florence Lasserre s’est installé à Saint-Lunaire, en Bretagne, où cette dernière sera adjointe au maire.

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