EN DIRECT – Procès de Monique Olivier : “Il m’a dit de passer le coup de fil” qui a servi d’alibi, affirme l’ex-femme de Fourniret

Monique Olivier, 75 ans, est jugée devant la cour d’assises des Hauts-de-Seine.
Elle comparait pour complicité dans les meurtres et les enlèvements de Marie-Angèle Domèce, Joanna Parrish, et Estelle Mouzin.
Ce vendredi, le père d’Estelle Mouzin doit prendre la parole après plusieurs incidents hier.

C’est une audience mouvementée qui se prépare ce vendredi au procès de Monique Olivier, jugée depuis le 28 novembre et jusqu’au 15 décembre pour complicité dans les enlèvements et les meurtres commis par son époux Michel Fourniret en 2003 sur Estelle Mouzin, 9 ans, en Seine-et-Marne, mais aussi sur Marie-Angèle Domèce, en 1988 et Joanna Parrish, en 1990, dans l’Yonne.

Jeudi, le ton est monté entre le président de la cour d’assises des Hauts-de-Seine, Didier Safar, et Me Seban, avocat de la partie civile, après plusieurs incidents à l’audience. L’avocat lui reproche d’abord d’avoir interrogé un témoin, une femme que Michel Fourniret avait tenté d’enlever en 2003, peu avant Estelle Mouzin, de façon très brutale. Le président a dit notamment à cette femme entendue par la cour :“Vous vous êtes désintéressée de cette affaire”. La robe noire reproche également au président d’avoir programmé l’audition de Selim Fourniret, fils du couple diabolique, en visioconférence – et non à la barre – mercredi, alors qu’il devait être présent à l’audience ce jour. Les parties civiles ont des questions à lui poser, elles préfèreraient le faire dans la salle d’audience.

Me Seban, enfin, n’a pu contenir sa colère quand le président ne l’a pas laissé interroger Monique Olivier après les témoignages de plusieurs de ses anciennes codétenues, qui ont livré plusieurs confidences que l’ex-femme de Michel Fourniret leur aurait faites sur la petite Estelle Mouzin. 

Après ces incidents, le bâtonnier devrait venir à l’audience. Eric Mouzin a également prévu de prendre la parole ce matin. 

AUDIENCE SUSPENDUE

L’audience est suspendue. Reprise à 14 heures.

QUITTER FOURNIRET

Me Seban : “Pourquoi ne pas avoir quitté Michel Fourniret comme l’a fait son ex-femme quand elle a senti le danger?”

Monique Olivier :”J’aurais dû, je sais pas…”

“JE N’AI PAS PENSÉ QUE C’ÉTAIT UN ALIBI” ASSURE MONIQUE OLIVIER

Le président: “A quel moment avez-vous compris ou su que ce coup de téléphone qu’il vous demandait de passer était un alibi?”

Monique Olivier : “J’ai pas pensé que c’était un alibi. S’il me demandait de faire ça c’est qu’il prévoyait de faire quelque chose. Mais le mot alibi… Il devait partir à la chasse (pour chercher des jeunes filles) oui… Il me l’a demandé. À l’époque, j’ai pas pensé qu’il utilisait ça comme alibi. Il m’a dit :’tu fais ça’, moi je l’ai fait. Si me le demandait, c’est qu’il avait quelque chose en tête. Son fils, je le connaissais pas…”

Sandrine, la femme de Jean-Christophe, écoute les déclarations depuis la barre. Elle est très troublée. La cour n’a plus de question à lui poser et l’autorise à quitter la salle. 

MONIQUE OLIVIER INTERROGÉE SUR L’APPEL DU 9 JANVIER 2003

Le président interroge Monique Olivier sur cet appel du 9 janvier 2003, passé depuis le domicile du couple Fourniret-Olivier, vers le domicile du fils de Michel Fourniret. Le 9 janvier 2003 correspond à la date de la disparition d’Estelle Mouzin et à l’anniversaire de Jean-Christophe, fils de Michel Fourniret. Monique Olivier dit avoir appelé chez Jean-Christophe pour son anniversaire à la demande de Michel Fourniret.

Monique Olivier : “Ce dont je me souviens, c’est qu’un matin, avant qu’il parte travailler, il (Michel Fourniret) m’a dit : ‘Tu appelleras Jean-Christophe, tu laisses sonner et tu ne parles pas. Je suis sûre qu’il m’a demandé ça. Il m’a dit : ‘tu laisses sonner et tu raccroches’. Je n’ai pas parlé du tout. 

Le président : “Vous avez laissé sonner le téléphone 99 secondes ? L’appel dure 99 secondes.”

Monique Olivier : “Je ne sais pas, j’ai pas compté. Il m’avait dit d’appeler et surtout de ne pas parler. J’ai fait ce qu’il m’a demandé.”

Me Seban : “Il vous a dit qu’il allait partir en chasse ce jour-là ?”

Monique Olivier : “Non, il m’a dit de passer le coup de fil, de ne pas parler. Il allait travailler… enfin, “travailler”… À sa façon. Je me souviens pas que c’était l’anniversaire de son fils. Je voulais pas le faire, mais je savais que si je ne le faisais pas, ça allait faire des histoires.”

Sandrine, la femme du fils de Michel Fourniret, ne se souvient pas d’un appel qui aurait sonné dans le vide. 

3 APPELS

Me Seban, avocat d’Eric Mouzin, interroge le témoin. Il rappelle que l’on sait qu’il y a eu 3 appels le 31 juillet 2002, le 9 janvier 2003 et le 9 février 2003 depuis le domicile de Michel Fourniret et Monique Olivier vers le domicile de Jean-Christophe, fils de Michel Fourniret, et de son épouse. 

“Se pourrait-il que vous confondiez les appels du 9 janvier et du 9 février”, demande l’avocat. Sandrine, épouse du fils de Michel Founiret, répond par la négative. 

“MONIQUE OLIVIER A PU TRAVESTIR SA VOIX”

Le président : “Vous vous souvenez du coup de fil ?”

Sandrine, femme de Jean-Christophe, fils de Michel Fourniret : “Oui, c’était très bref. Il se nomme.”

Le président : “Il a dit, c’est Michel Fourniret ?”

Sandrine : “Oui, il se nomme et demande Jean-Christophe. J’ai dit qu’il n’était pas là. Il commence à s’énerver. Je lui ai dit que j’étais désolée, qu’on travaillait.(…) Je lui ai dit qu’il pouvait rappeler le lendemain. Chose qu’il n’a pas faite.”

Le président : “Pourquoi cet appel selon vous ?”

Sandrine : “Moi, je pense à l’heure d’aujourd’hui que c’était un alibi pour monsieur (Fourniret).”

Le président : “Oui, mais qui vous a appelé. Vous dites que c’était une voix d’homme…”

Sandrine : “Je pense qu’elle (Monique Olivier) a pu masquer sa voix.”

Le président : “Vous voulez dire que Monique Olivier a travesti sa voix ?”

Sandrine : “C’est possible, ils sont capables de tout. Ça je peux le dire aujourd’hui avec du recul.”

Elle indique que la personne au bout du fil n’a pas précisé qu’elle appelait pour l’anniversaire, c’est elle qui l’a déduit.”

“J’AI RÉPONDU AU TÉLÉPHONE”

Sandrine, femme du fils de Michel Fourniret, assure avoir répondu au téléphone le 9 janvier 2003, jour de l’enlèvement d’Estelle. “J’ai répondu au coup de téléphone. La date, l’heure, je pense que tout a été vérifié. Les faits… Ça nous est tombé dessus. C’est difficile.”

Le président indique que le témoin a varié dans ses déclarations entre 2004, 2005 et aujourd’hui. Sandrine s’agace et répète avoir répondu au coup de fil le 9 janvier 2003, date de l’enlèvement d’Estelle et de l’anniversaire de son mari, Jean-Christophe, fils de Michel Fourniret. Le coup de fil a servi pendant des années à Michel Fourniret d’alibi. 

Le président : “La voix était celle d’un homme ?”

Sandrine : “Oui tout à fait.”

En 2019, Monique Olivier a dit que c’est elle qui avait passé ce coup de fil au fils de Fourniret à la demande de l’ogre des Ardennes.

ÉPOUSE DU FILS FOURNIRET

Sandrine, l’épouse de Jean-Christophe, fils de Michel Fourniret, est maintenant à la barre. “Le coup de téléphone était très très bref. Je ne pouvais pas me douter que ce soit quelqu’un d’autre qui a appelé (que Michel Fourniret) (…) J’ai dit que que Jean-Christophe n’était pas là et que s’il voulait, il pouvait rappeler le lendemain, le 10 janvier.”

Le président Didier Safar lui demande si elle est sûre que c’est bien une voix d’homme qui l’a appelée. Elle répond par l’affirmative. Il s’étonne de la réponse, car ça n’est pas ce qu’elle avait dit en 2004. Elle avait alors dit qu’elle ne se souvenait pas de ce coup de téléphone. “S’il avait appelé pour téléphoner pour l’anniversaire de mon mari, je m’en serais souvenu. Il n’a jamais appelé pour son anniversaire. Il a essayé de renouer le contact avec lui 4 ou 5 fois. (…) Mon mari n’a jamais connu son père, ses parents ont divorcé quand il avait deux ans.”

ALIBI

Jean-Christophe, fils de Michel Fourniret, est très ému à la barre. Il n’a pas été élevé par son père. Il dit que son père a essayé de renouer le contact avec lui, avec quelques appels et courriers. 

Le 9 janvier, jour de l’enlèvement d’Estelle et de l’anniversaire de Jean-Christophe, ce dernier n’était pas chez lui. C’est son épouse qui a décroché le téléphone quand un appel a été passé depuis le domicile du couple Fourniret-Olivier.

Me Allali : “Votre père vous a utilisé comme alibi dans l’enlèvement d’une petite fille, ça vous fait quoi ?”

Jean-Christophe :” C’est particulier (…) Ça marque quand même”.

Me Seban : “Ce qui est certain, c’est que vous n’étiez pas chez vous ce jour-là, votre père ne vous a jamais appelé et vous n’avez jamais appelé votre père.”

Le témoin répond : “Tout à fait”. 

COUP DE FIL

Le jour de la disparition d’Estelle Mouzin correspond au jour de l’anniversaire de Jean-Christophe 

Michel Fourniret s’est servi de cela comme d’un alibi pendant des années. Il avait dit être chez lui le jour de l’enlèvement de la fillette, et avait pour preuve un appel à son fils pour lui souhaiter son anniversaire. La téléphonie a montré qu’un appel a effectivement été passé depuis le domicile du couple Monique Olivier-Michel Fourniret à 20h08 le 9 janvier 2003 pendant 80 secondes. Cela avait innocenté Michel Fourniret.

Ça n’est qu’en 2019 que Monique Olivier a fait tomber l’alibi de son mari, disant que c’est elle qui avait passé ce coup de fil. 

PREMIER TÉMOIN, L’UN DES FILS DE MICHEL FOURNIRET

Un premier témoin est appelé à la barre. Il s’agit de Jean-Christophe, technicien, 59 ans. C’est l’un des fils de Michel Fourniret et beau-fils de Monique Olivier. Il est habillé tout en noir et a le crâne rasé. Il dit avoir été entendu par les enquêteurs dans le cadre des investigations pour la recherche d’Estelle Mouzin. Il était à son travail le jour des faits. 

HUIS CLOS PARTIEL REJETÉE, SELIM OLIVIER SERA ENTENDU EN PRÉSENCE DE LA PRESSE

La cour a délibéré sur la requête de Selim Olivier. Sa demande est rejetée. Le huis clos partiel n’est pas ordonné. “Seules les victimes ont droit au huis clos” et les “témoins anonymes”, et “il a déjà témoigné devant une cour d’assises”.

Selim Fourniret doit donc se présenter le mercredi 13 décembre au tribunal de Nice pour être entendu par cette cour. Il sera entendu en visio. Le président rappelle qu’il est interdit d’enregistrer les débats et de prendre des photos, redoutant sans doute que des gens prennent en photo le fils du couple Monique Olivier -Michel Fourniret. 

DEMANDE DE HUIS CLOS PARTIEL DU FILS DE MICHEL FOURNIRET ET MONIQUE OLIVIER

Selim Olivier, dans son mail au président Didier Safar, écrit encore : “Je refuse de m’exprimer en présence des 350 journalistes accrédités. Mon témoignage n’est pas une représentation théâtrale et je ne veux pas qu’il se retrouve sur les réseaux sociaux et dans la presse.”

Me Seban: “Selim Olivier ne peut choisir la manière dont il va être entendu. (…) Je vous demande de ne pas accepter ce huis clos. Son image ne sera pas diffusée. Le débat doit être public.” 

L’avocat général s’oppose également à cette demande de huis clos partiel. La cour vient de se retirer pour délibérer. L’audience est suspendue. 

SELIM OLIVIER, FILS DE MONIQUE OLIVIER ET MICHEL FOURNIRET, MENACÉ DE MORT ?

Le président fait part aux parties d’une difficulté posée par le témoignage de Selim Olivier, fils de Michel Fourniret et Monique Olivier. Il a fourni un certificat médical disant qu’il ne pouvait pas venir à l’audience et devait être entendu mercredi en visio.

Selim Olivier a envoyé un mail dans la nuit, demandant une audition à huis clos partiel. Il évoque sa “sécurité personnelle”, et affirme faire l’objet de “menaces de mort”. Il ne veut pas voir “des informations sensibles dans la presse”, et redoute les effets sur sa “sécurité et celle de ses proches.” 

L’AUDIENCE EST REPRISE

L’audience est reprise. 

LE VICE-BÂTONNIER DANS LE BUREAU DU PRÉSIDENT

L’audience n’a pas encore commencé. Le vice-bâtonnier, Fabien Arakelian, est actuellement dans le bureau du président de la cour d’assises, Didier Safar. 

ÉRIC MOUZIN VA PRENDRE LA PAROLE

Éric Mouzin va prendre la parole ce matin après les incidents survenus dans la soirée jeudi. 

Me SEBAN, AVOCAT D’ERIC MOUZIN, MENACÉ DE SANCTION DISCIPLINAIRE

Parmi les incidents survenus jeudi, l’un implique Me Seban, avocat d’Éric Mouzin, le père d’Estelle. “Le président m’a menacé de sanction disciplinaire au moment où j’interrogeais les codétenues de Monique Olivier, qui racontaient ce que celles-ci leur avaient dit de l’enlèvement d’Estelle. C’était un moment très fort où j’espérais pouvoir faire avancer Monique Olivier. Elle a d’ailleurs avancé puisqu’elle a dit qu’Estelle n’avait jamais changé de tenue, ce qui donne l’idée qu’elle l’a vue plusieurs fois. Mais le président a coupé court à cette confrontation entre Monique Olivier et ces codétenues. Ça fait beaucoup”, a-t-il expliqué.

BÂTONNIÈRE OU VICE-BÂTONNIER

La bâtonnière Isabelle Clanet dit Lamanit ou le vice-bâtonnier, Fabien Arakelian, devrait être présent à l’audience après les incidents de jeudi. 

L’AUDIENCE VA REPRENDRE

L’audience doit reprendre à 10h30. L’audience risque d’être mouvementée après plusieurs incidents survenus jeudi dans la salle. 

Dès le premier jour de son procès, l’accusée, âgée de 75 ans, avait assuré qu’elle essayerait de s’exprimer du mieux qu’elle pouvait, et de donner des réponses aux familles endeuillées. Si elle a reconnu les faits, elle est restée très vague sur plusieurs éléments et n’a toujours pas indiqué où se trouvaient les corps de Marie-Angèle Domèce et Estelle Mouzin, jamais retrouvés. 

La septuagénaire a assuré “ne plus se souvenir”. Les experts ont pourtant assuré qu’elle n’avait pas de problèmes mnésiques. 


Aurélie SARROT

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